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Affaires et sociétés - Trois-Rivières

Survol des clauses de non-concurrence en matière commerciale

Table des matières

En matière commerciale, les entreprises doivent s’assurer que les clauses de non-concurrence qu’elles requièrent dans leurs contrats répondent à des conditions précises afin de s’assurer de leur validité et donc, protéger leurs intérêts.

La clause de non-concurrence est la clause d’un contrat par laquelle une des parties s’interdit, pour un temps et un lieu déterminés, d’exercer une activité professionnelle ou commerciale susceptible de faire concurrence à celle de l’autre[1].

Il importe d’établir qu’en matière commerciale, un engagement de non-concurrence sera jugé raisonnable et légal à la condition d’être limité quant à sa durée, à son territoire ainsi qu’aux activités visées et nécessaires pour protéger les intérêts légitimes de la partie bénéficiaire[2]. Ces trois conditions sont cumulatives et doivent être analysées les unes par rapport aux autres, en vases communicants.

Des critères qui importent

Il faut, en premier lieu, différencier le contrat commercial du contrat travail ou de services afin de faire l’analyse appropriée de sa validité. Il existe une présomption de validité des clauses de non-concurrence en matière commerciale, où la force de négociation est habituellement plus équilibrée entre les cocontractants que dans le cas d’un contrat de travail.

Ces critères sont importants à prendre en considération tant lors de la négociation, de la conclusion de l’entente que de la rédaction. En cas de contestation de la validité de la clause de non-concurrence devant les tribunaux, le juge qui entend l’affaire ne pourra « réécrire » la clause pour la rendre valide, mais seulement la déclarer abusive et illégale.

En matière commerciale, un des éléments qui peut être alors pris en compte est l’identité de la partie ayant rédigé la clause de non-concurrence. En effet, il sera difficile pour une partie de prétendre à son absence de connaissance des limites territoriales alors qu’elle les a elle-même rédigées !

À noter que ce qui suit s’applique qu’aux clauses de non-concurrence en matière commerciale et ne peut être transposé intégralement aux contrats d’emploi ou de services, les critères en ces matières étant différents.

Durée

Le principe veut qu’une clause de non-concurrence d’une durée de cinq ans soit généralement reconnue par les tribunaux comme étant valide. Chaque cas étant un cas d’espèce, des clauses d’une durée allant jusqu’à dix ans ont aussi été reconnues valides par la jurisprudence.

Une telle clause peut cependant comprendre un terme indéterminé, mais déterminable, ce qui satisfait le critère exigé par la jurisprudence quant à la durée[3]. Cette dernière ne doit donc pas être indéterminable. Par exemple, si la clause prévoit que la clause de non-concurrence est en vigueur tant que l’entreprise est exploitée, celle-ci est considérée comme ayant un terme indéterminé, mais éventuellement déterminable, soit la fin de l’exploitation de cette entreprise.

Portée territoriale et limites

Il importe de bien circonscrire le territoire visé par la clause de non-concurrence aux intérêts légitimes en jeu. Dans le cas contraire, la clause pourrait être déclarée abusive. Toutefois, certaines limites territoriales, bien que couvrant un large territoire, seront légitimes compte tenu de la diversité des activités de l’entreprise. En effet, la portée territoriale peut être planétaire s’il est démontré que la partie bénéficiaire de la clause de non-concurrence a des intérêts légitimes à travers la planète.

Afin de bien déterminer le territoire en matière commerciale, celui-ci doit représenter le territoire couvert par les activités de l’entreprise au moment de la signature de la clause de non-concurrence. Attention, la limitation territoriale ne peut être assujettie au positionnement de la clientèle desservie.

Également, la clause doit être suffisamment précise dans la description de la région visée. Par exemple, la « Région de… » pourrait être remplacée par la distance couverte par un rayon en kilomètre de l’hôtel de ville de la ville où se situe l’entreprise ou par l’énumération des municipalités visées.

La clause nécessite, en tout état de cause, de comporter une limite territoriale puisque l’absence totale de territorialité entraine son invalidité.

Services en ligne

Une entreprise qui œuvre dans le domaine des services en ligne n’est pas nécessairement assujettie à des frontières physiques. Elle peut donc vendre ses produits partout à travers le monde à partir d’une plateforme Web, et ce, sans disposer d’une base physique à aucun de ces endroits, ce qui peut compliquer la détermination des limites territoriales d’une clause de non-concurrence.

Or, dans cette situation, la jurisprudence est claire ; la partie bénéficiaire de la clause non-concurrence ne peut passer outre l’exigence de prévoir une limite territoriale.

En effet, il ne suffit pas de « pouvoir » faire des ventes à un endroit ; il faut, pour que la clause restrictive soit valide, qu’il y ait effectivement un certain achalandage — une clientèle active — dans le territoire donné afin d’être considéré comme protégeant valablement des intérêts légitimes.

Les activités visées

Dans le même ordre d’idée, les activités visées seront jugées raisonnables si elles sont limitées à ce qui est nécessaire pour protéger les intérêts légitimes de son bénéficiaire.

Il est généralement reconnu que la clause de non-concurrence doit tout de même permettre à une personne de gagner sa vie en utilisant ses connaissances et ses aptitudes professionnelles[4].

La clause de non-concurrence doit en principe ne couvrir que les seules activités poursuivies par l’entreprise au moment de la transaction ou les activités qui sont prévues dans la vente, par exemple.

La précision est donc de mise dans la description des activités prohibées. Tout comme dans le cas des autres critères ci-dessus mentionnés, l’absence de stipulation quant aux activités prohibées à la clause de non-concurrence est fatale lors de l’examen de validité.

L’expertise du domaine peut aussi être prise en considération dans l’analyse de la validité de la clause et de l’étendue des activités visées par celle-ci. À titre d’exemple, il pourrait être opportun de restreindre les activités d’une partie si ses connaissances sont uniques et névralgiques pour un type d’industrie.

Il demeure un certain éclaircissement à obtenir quant à l’interprétation de ces clauses aux entreprises faisant affaire à l’international à travers des services en ligne. En effet, le mouvement de mondialisation issu de la progression technologique a influencé les entreprises à rejoindre un marché beaucoup plus important à travers les différentes plateformes en ligne. Bien qu’un certain cadre ait été établi par la jurisprudence voulant qu’aucune clause ne puisse échapper aux trois conditions énumérées ci-dessus, il sera intéressant de suivre l’application qu’en feront les tribunaux.