Un nouvel outil d’urbanisme : le règlement de zonage incitatif
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Le 1er juin 2023 a été sanctionnée la Loi modifiant la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme et d’autres dispositions (2023, chapitre 12) (Projet de loi no 16). Bien que la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme a été modifiée à de très nombreuses reprises au fil des ans, cette dernière modification est l’une des plus importantes depuis l’adoption de cette loi en 1979.
Parmi ces modifications, les nouveaux articles 145.35.1 à 145.35.4 ajoutés à la loi susmentionnée accordent maintenant aux municipalités un pouvoir de zonage incitatif comme dans certaines provinces canadiennes et états américains.
L’objectif principal du zonage incitatif est de permettre à une municipalité de stimuler son développement selon ses priorités et ses politiques d’aménagement, tout en donnant aux promoteurs une plus grande liberté de conception et d’utilisation de leurs immeubles. Ainsi, la municipalité peut adopter un règlement prévoyant des normes plus permissives que celles du règlement de zonage pour un projet dont le demandeur du permis de construction ou du certificat d’autorisation s’engage, dans une entente, à fournir une contrepartie additionnelle. Le demandeur peut évidemment décider de ne pas conclure d’entente et de réaliser son projet selon les normes prévues au règlement de zonage.
Les normes incitatives prévues au règlement peuvent s’appliquer dans certaines zones ou selon la nature et les caractéristiques du projet. Elles peuvent concerner tous les objets en matière de zonage, sauf les usages, dont notamment les normes de densité, de volumétrie ou d’implantation.
Par ailleurs, les contreparties qu’une municipalité peut exiger du demandeur dans le cadre de l’entente doivent l’être uniquement parmi celles prévues à l’article 145.35.2, soit :
1o l’intégration dans le projet d’unités de logement abordable, social ou familial [exemples : incorporation dans le projet de 10 % de logements abordables, ajout d’un nombre minimal de logements comportant au moins 3 chambres];
2o le respect de toute condition relative à la réalisation du projet qui permet d’atteindre des objectifs en matière de performance environnementale [exemples : installation d’un système de collecte et de gestion écologique des eaux de pluie sur le site; inclusion de normes plus élevées en matière d’efficacité énergétique, exigence d’un certificat d’homologation du programme Novoclimat-Grand bâtiment multilogement ou d’un certificat de bâtiment durable du programme LEED]];
3o la réalisation, sur le site visé par la demande ou à proximité de celui-ci, de tout aménagement ou équipement d’intérêt public [exemples : ajout d’espaces et de salles de réunion, de garderies, d’installations pour cyclistes, d’un parc public];
4o la préservation ou la restauration d’un immeuble qui a une valeur patrimoniale.
Le règlement peut fixer les critères en fonction desquels l’une ou l’autre des contreparties peut être exigée. Il peut également confier au conseil municipal le choix de décider dans chaque cas laquelle contrepartie est exigée.
Enfin, le règlement doit prévoir les garanties financières qui peuvent être exigées du demandeur du permis de construction ou du certificat d’autorisation.
L’adoption d’un règlement de zonage incitatif doit respecter la procédure préalable usuelle prévue pour un règlement d’urbanisme, savoir avis de motion, projet de règlement, assemblée de consultation publique. De plus, selon le paragraphe 2o du quatrième alinéa de l’article 123 de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme, le règlement est susceptible d’approbation référendaire s’il prévoit une norme de remplacement qui porte sur une matière prévue à l’un des paragraphes 1° à 5°, 6° et 17° à 23° du deuxième alinéa de l’article 113 ou au troisième alinéa de cet article.
Avant d’autoriser la conclusion de l’entente, le conseil doit en soumettre un projet au comité consultatif d’urbanisme.
Le conseil peut également décider de soumettre le projet d’entente à une consultation publique selon les articles 125 à 127 de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme, avec les adaptations nécessaires.
Finalement, la résolution qui autorise la conclusion d’une entente doit indiquer les normes de remplacement qui s’appliquent au projet du demandeur et contenir une description détaillée de la prestation à laquelle ce dernier est tenu.
L’article a originellement été publié dans la chronique juridique du mois de mai 2024 du magazine Scribe de L’Association des directeurs municipaux du Québec (ADMQ)